Bulletin N°50

août 2024

Modernes par tradition : réseaux transnationaux soufis, État-nation et diplomatie religieuse au Sahel – Version française

Brahim Afrit

Introduction

Cet article interroge d'importantes dynamiques que connaissent actuellement certains réseaux soufis transnationaux à travers le Sahara. Il examine plus particulièrement la manière dont des acteurs soufis du Sahel choisissent de s'internationaliser selon une stratégie leur permettant de faire face aux récents défis qu’ils rencontrent dans leurs pays respectifs. Alors que l'essentiel des débats publics sur le Sahel s'est concentré ces dernières années sur la montée en puissance des groupes armés se réclamant du djihad, contribuant à ce que beaucoup considèrent comme une crise généralisée de l'État dans la région ; peu de choses ont été dites sur les communautés soufies, qui ont été parmi les principales cibles de ces groupes[1]Concernant le lien entre la montée du djihadisme et l'affaiblissement de l'État au Sahel, voir une étude de cas comparative sur le Mali et le Burkina Faso : Clionadh Raleigh, Héni Nsaibia & … Continue reading. Cette exposition particulière des soufis à la récente vague djihadiste est due au fait que la plupart des groupes armés opérant dans la région, tels qu'AQMI, Ansar Dine ou Boko Haram, ont tendance à puiser leurs références religieuses dans le salafisme, un courant religieux réformiste bien connu pour son opposition au soufisme[2]Voir, à titre d'illustration, le cas de la destruction des sanctuaires soufis de Tombouctou : Oumar Ba, « Contested Meanings : Timbuktu and the Prosecution of Destruction of Cultural Heritage as … Continue reading. Cette contestation croissante sur le terrain religieux est d'autant plus difficile pour les soufis qui se considèrent depuis longtemps comme des citoyens de seconde zone dans l'État-nation postcolonial où ils subissent une marginalisation économique, sociale et politique aux multiples facettes[3]Le salafisme ou "salafiyya" est un mouvement réformiste musulman. La plupart des non-Salafis considèrent Muḥammad Ibn ‘Abd al-Wahhāb (d. 1792), un érudit réformiste du Najd, dans l'actuelle … Continue reading. Ces communautés religieuses déplorent plus particulièrement le déclassement de leurs institutions traditionnelles, à commencer par la madrasa, le site historique de l'enseignement musulman, sous l'effet de décennies de politiques laïques et centralisatrices défendues par les élites postcoloniales au pouvoir[4]Pour des études de cas sur les soufis et l'éducation dans le contexte sahélien contemporain, voir Corinne Fortier, “Orality and the Transmission of Qur'anic Knowledge in Mauritania", et … Continue reading.

En outre, peu de choses ont été dites jusqu'à présent sur la manière dont ce défi à multiples facettes a poussé les acteurs soufis du Sahel à souscrire à des projets promus par des États tiers qui utilisent l'islam à des fins de soft power, c’est-à-dire afin d’assoir leur influence et promouvoir leurs intérêts nationaux. Cet article s'appuie sur une ethnographie menée en Algérie auprès de soufis du Sahel, en particulier des disciples de la Tijaniyya et, plus important encore, de la Qadiriyya, qui ont récemment décidé de prendre part à la diplomatie religieuse naissante de l'Algérie[5]L'ordre Qadiriyya est, avec la Tijaniyya, son principal rival au Sahel, le mouvement soufi le plus répandu au Sahel. Pour les racines historiques de cet ordre soufi dans la région, voir Abdal Aziz … Continue reading. Cet article met en lumière ces soufis, qu'ils soient étudiants en religion, aspirants savants, instructeurs de madrasa ou imams, qui décident de se tourner vers ces opportunités afin d'accéder aux ressources offertes par les institutions et les représentants d’États étrangers à la région. Ces ressources vont des bourses d'études à des fonctions de représentation publique en passant par des infrastructures religieuses. Cet article analyse comment ces opportunités religieuses promues dans le sillage de ce projet étatique poursuivant des intérêts séculiers leur permettent de renforcer leur position face à leurs rivaux dans leur pays d'origine, qu'ils soient religieux ou non. À travers cette étude de cas, l'article analyse la manière dont ces acteurs véhiculent leur vision religieuse du monde par le biais de leur pragmatisme politique. S'engager dans cette dynamique transnationale leur permet en outre de concilier leurs opinions religieuses avec leurs aspirations en tant que citoyens afin de mieux faire face aux défis auxquels ils sont confrontés dans leur propre contexte national.

Des réseaux religieux pour des intérêts séculiers

Dans les années 2000, les autorités algériennes ont commencé à poser les jalons d’un projet de diplomatie religieuse, après plus d'une décennie de troubles politiques connus sous le nom de « décennie noire ». Cet épisode de violence politique a été marqué par une confrontation sanglante entre les services de sécurité de l’État et des groupes armés après l'annulation par les autorités d'une série d'élections remportées par le parti Front Islamique du Salut (FIS).[6]Pour une vue d'ensemble de la crise politique algérienne des années 1990, voir Martin Evans & John Phillips (dir.), Algeria : Anger of the Dispossessed, New Haven, Yale University Press, 2007, … Continue reading. Ce contexte interne a porté un coup sévère à l'influence internationale du pays, sonnant le glas de sa « diplomatie flamboyante ». Une fois l'ordre public rétabli, les services de sécurité du pays qui n'ont pas ménagé leurs efforts pour repousser hors des frontières sud de l'Algérie, dans le Sahel, les groupes insurgés les plus radicaux issus de la branche armée du FIS ont commencé à craindre que ces groupes ne profitent de l'affaiblissement des États de la région pour faire de la ceinture saharo-sahélienne une base arrière leur permettant de prendre le pays pour cible depuis l'extérieur. La question des répercussions régionales de l’après crise est pour les autorités algériennes d'autant plus sensible que de nombreux groupes armés nés pendant la décennie noire ont réagi au déracinement de leur champ de bataille natal en se mondialisant, par leur affiliation à des réseaux djihadistes internationaux comme Al-Qaïda et, plus récemment, ISIS (Daesh), étendant ainsi leur portée à l'ensemble de la ceinture saharo-sahélienne. L'un des exemples les plus parlants est celui du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat), fondé en Algérie en 1998, qui s'est rebaptisé en 2007 Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) après que ses cadres ont prêté allégeance au réseau international djihadiste[7]Pour le lien entre les groupes militants algériens et le Sahel, voir Alexander Thurston, Jihadists of North Africa and the Sahel Local Politics and Rebel Groups, Cambridge, Cambridge University … Continue reading.

Ce contexte national interfère également avec les récents bouleversements régionaux qui ont vu s'intensifier la concurrence entre plusieurs États étrangers dans la région du Sahel, par le biais du parrainage de divers acteurs et institutions religieux locaux, publics et privés. Alors que le rôle de l'Arabie Saoudite, de l'Iran, et de la Turquie a attiré l'essentiel de l'attention des études académiques ces dernières années, peu de choses ont été dites sur les efforts déployés par les autorités algériennes pour parrainer des réseaux religieux transnationaux. Cette évolution est aussi une réaction à l'influence croissante de nouveaux acteurs dans le voisinage sud de l'Algérie. Ces efforts visent notamment à contrer le rôle religieux accru du Maroc, en particulier après que les autorités du pays ont commencé à étendre au Sahel leur diplomatie religieuse couronnée de succès en Afrique de l'Ouest. En quelques années, les autorités marocaines ont réussi à défier ces puissances religieuses établies en Afrique de l'Ouest en s'appuyant sur des réseaux religieux, culturels, diplomatiques, économiques et diasporiques de longue date pour promouvoir les intérêts séculiers du pays. Cette stratégie gravite particulièrement autour de la Tijaniyya, la confrérie soufie - pourtant originaire d'Algérie - qui compte la plupart de ses plus de deux cents millions de disciples en Afrique de l'Ouest et au Sahel[8]Sur la stratégie Tijani du Maroc en Afrique de l'Ouest, voir Yousra Hamdaoui & Bakary Sambe, « Des Usages du Soft Power Religieux du Maroc sous le Règne de Mohammed VI », Afrique(s) en … Continue reading. En réaction à cette dynamique régionale et face au blocage de l'intégration maghrébine, enlisée dans des tensions croissantes avec le Maroc, les autorités algériennes ont également décidé de se tourner vers le Sahel, promouvant la région comme l'autre continuum "naturel" pour l'influence et le développement du pays.

Portées par la perspective de placer le pays comme la principale puissance régionale dans la ceinture saharo-sahélienne, les autorités algériennes ont commencé à leur tour à soutenir des acteurs et des institutions religieuses dans la région. Ces dernières années, les initiatives religieuses soutenues par l'Algérie sont allées de l'organisation d'événements religieux internationaux au lancement de nouvelles technologies de l'information et de la communication diffusant des contenus religieux. On peut citer Miqraa, une application mobile de récitation du Coran par sessions collaboratives, gratuites et ouvertes aux musulmans du Sahel. Pierre angulaire de cette orientation sahélienne, plusieurs des initiatives les plus ambitieuses s'articulent autour de l'éducation à travers la formation du personnel religieux. À cette fin, des centaines de bourses d'études ont récemment été spécifiquement consacrées aux savant religieux, les oulémas, et au personnel religieux de la région. En outre, les autorités algériennes ont récemment ouvert deux instituts de formation religieuse pour des publics internationaux appelés à servir dans leurs pays respectifs. L'un d'entre eux est hébergé à la Grande Mosquée d’Alger (Djamaâ El-Djazaïr), l'institution religieuse récemment créée pour servir de porte-drapeau à ce projet de diplomatie religieuse, et l'autre à Aïn Madhi, le lieu de naissance d’Aḥmad Tījānī (mort en 1815), le fondateur de la confrérie soufie éponyme. Un nombre croissant de programmes religieux spéciaux ont également été conçus et diffusés par le biais de nouveaux médias d'État allant de chaînes de télévision et de radio à des sites web et réseaux sociaux, également créés récemment pour s'adresser au public subsaharien. Ces efforts comprennent également des projets directement mis en œuvre dans les pays du Sahel, tels qu'un institut de formation pour le personnel religieux qui ouvrira bientôt ses portes à Agadez, au Niger, directement affilié au ministère algérien des affaires religieuses. D'autres initiatives récentes "sur site" comprennent la distribution gratuite de littérature religieuse par les canaux diplomatiques, plus particulièrement des copies du Coran, y compris en braille. Certaines de ces initiatives sont souvent déployées en soutien à des œuvres caritatives et associations humanitaires locales et sont promues dans le cadre des efforts des autorités algériennes pour affirmer le pays comme un partenaire économique clé pour le développement du Sahel. Ce regain d’attention pour le Sahel est à cet égard déployé dans le cadre d'initiatives économiques plus larges, telles que la création récente d'une zone de libre-échange centrée sur le Sahel, en particulier le Mali, la Mauritanie et le Niger, trois pays qui partagent des frontières terrestres avec l'Algérie.

Vrai parce que local

Pour faire une entrée décisive sur ce nouveau terrain de compétition internationale, les autorités algériennes ont considérablement accru leur attention pour le soufisme, en particulier la confrérie Qadiriyya. Toutefois, ce n'est pas la première fois que les représentants officiels du pays font appel aux réseaux soufis transnationaux. Parmi ces initiatives, on peut citer la première grande manifestation internationale de la confrérie Tijaniyya, organisée en 1984 à Aïn Madhi, à laquelle ont participé des dizaines de chefs religieux, notamment du Maghreb, d'Égypte, du Soudan, d'Afrique de l'Ouest et du Sahel. Cette manifestation n'a pas été renouvelée. L'année suivante, probablement en réaction à cet événement, le Maroc a organisé une initiative similaire dans la loge (zaouïa) Tijani de Fès, où repose le corps du fondateur. Cet événement est depuis lors devenu le principal rassemblement annuel international de la Tijaniyya, permettant aux autorités marocaines de promouvoir l'ordre comme marocain et même d'institutionnaliser - bien que de manière informelle - le mausolée du fondateur en tant que troisième site de pèlerinage le plus sacré pour les disciples de la confrérie, après La Mecque et Médine.

Contrairement aux initiatives précédentes, ce nouveau projet de diplomatie religieuse axé sur le soufisme se concentre sur le Sahel et, dans une certaine mesure, sur l'Afrique de l'Ouest. Cet ancrage régional est étayé par un récit sur un héritage religieux en partage à travers le Sahara, l'Algérie étant dans ce discours la gardienne d'une tradition « locale ». Cet islam local, réputé modéré, est présenté comme un remède à la crise actuelle de l'État dans la région. Les autorités ont justifié leurs efforts en matière de diplomatie religieuse par la nécessité de « restaurer » les artefacts du véritable « Islam des ancêtres » et de cultiver sa portée sociale pour lutter contre le fanatisme religieux croissant, considéré comme étranger à la région. Ce discours n'est pas unique dans le contexte de la « guerre mondiale contre la terreur » (Global War on Terror) lancée sous la houlette des États-Unis en réaction aux attaques du 11 Septembre 2001, puisque les tenants du label « Islam des ancêtres » ont également tendance à invoquer un discours plus large sur un « islam du juste milieu» ou wasatiyya[9]L'idée de wasatiyya découle d'une référence coranique à la communauté musulmane en tant que « nation du milieu », dans le sens de modérée et tolérante. Pour une étude de cas sur la … Continue reading.  Néanmoins, ce discours invoquant un islam « modéré » est dans ce cas mêlé à la promotion du soufisme local comme rempart contre le fanatisme religieux - souvent assimilé au salafisme - et comme alternative à un libéralisme occidental prétendument en faillite[10]Pour le contexte de l'Afrique de l'Est, voir Rüdiger Seesemann, « African Islam or Islam in Africa ? Evidence from Kenya”, dans Roman Loimeier & Rüdiger Seesemann (dir.), The Global Worlds … Continue reading. Contrairement à d'autres discours faisant appel à la wasatiyya, ce récit affirme que non seulement cet islam local est « vrai » et « authentique », mais que les soufis en sont les gardiens exclusifs, parvenant à sauvegarder les institutions et les pratiques traditionnelles de l'islam des ancêtres grâce à leur engagement religieux, éducatif et social. La mise en dialogue de ces multiples références religieuses avec le contexte géopolitique actuel de la région a permis aux autorités algériennes de faire appel à un large éventail d'acteurs religieux sahéliens confrontés aux défis croissants posés par la crise de l'État dans plusieurs pays de la région, notamment sur le plan sécuritaire et socio-économique.

Mêlant références religieuses soufies et realpolitik, ce discours revivaliste d’initiative étatique et prônant la restauration d'une tradition pré-moderne au service d'une gouvernance séculière s'articule autour du parrainage d'acteurs et d'institutions de la confrérie soufie Qadiriyya dans la région. Cela ne veut pas dire que les autres confréries soufies répandues dans le Sahel - et dont les racines historiques sont profondément liées à l'Algérie par le biais de leurs fondateurs - à savoir la Sanusiyya et, plus important encore, la Tijaniyya, sont laissées de côté. Cela dit, le cas de la Sanusiyya est particulier. Bien que cette confrérie ait été fondée à Al-Jaghboub dans l'actuelle Libye par un savant religieux, Mohammed ben Alī  al-Sanūsī  (mort en 1859), originaire de Mostaganem dans l'actuelle Algérie, la plupart de ses disciples se trouve dans des pays qui ne partagent pas de frontière terrestre avec l'Algérie, tels que le Tchad, le Nigeria et le Soudan, à l'exception de la Libye. En outre, la confrérie a amorcé ces dernières années une évolution vers le salafisme, en particulier sous l'influence de ses dirigeants libyens.

Concernant la Tijaniyya, les autorités algériennes ont récemment mis en œuvre plusieurs initiatives destinées à remettre en cause le statut quo actuellement en faveur de leurs homologues marocains qui ont pris le dessus sur la revendication du leadership de la Tijaniyya dans le monde. Ces initiatives comprennent la rénovation de l’infrastructure de la confrérie dans tout le pays, en particulier les sites historiques liés aux fondations historiques et spirituelles de l’ordre, tels que Boussemghoun, Oued Souf, et Aïn Madhi. Dans le cadre de leur ambition de repositionner le siège du califat général Tijani comme l'autorité suprême de la confrérie dans le monde, les autorités ont également lancé à la fin des années 2000 un rassemblement annuel à Aïn Madhi (Figure 1), dans le but d'attirer une audience subsaharienne et de propulser ce site comme un des carrefours de la diplomatie religieuse de l'Algérie. Parmi les autres événements majeurs récemment organisés, on peut citer le séminaire international de 2021 consacré à l'héritage d’Aḥmad Tījānī où plusieurs personnalités du Sahel ont été invitées en grande pompe.

Figure 1 : Un chapeau traditionnel peul au siège du califat général de Tijani à Aïn Madhi, offert au calife par des pèlerins maliens à l’occasion du rassemblement annuel. Source : photographie de l'auteur.

La plupart de ces initiatives qui visent à promouvoir l'Algérie en tant que berceau de la Tijaniyya sont déployées dans le cadre d'approches plus larges qui dépassent les objectifs religieux et sont souvent menées en tandem avec des efforts diplomatiques à visée séculière. Ainsi, depuis les années 2000, les autorités algériennes ont fait appel aux services de l'establishment Tijani local pour une douzaine de missions officielles au Sahel. À titre d'illustration, le cheikh Belarabi, l’actuel calife général de la Tijaniyya siégeant à Aïn Madhi, a été envoyé, à bord de l'avion présidentiel officiel, pour des missions diplomatiques spéciales dans plusieurs pays de la zone, où il a été reçu avec les honneurs par les plus hautes autorités politiques. En février 2019, le chef Tijani a été reçu par le président du Niger, Mahamadou Issoufou, et par le futur - et désormais ancien - président Mohamed Bazoum. En février 2024, le cheikh a également été envoyé en mission spéciale en Mauritanie, où il a été reçu par le président Mohamed Ould Ghazouani. Cette rencontre a eu lieu quelques jours avant que ce dernier ne rejoigne le président algérien Abdelmadjid Tebboune à Tindouf pour inaugurer un poste frontière et une zone franche entre les deux pays. Cet événement a été marqué par l’inauguration officielle de la route Tindouf-Zouerate, un projet entièrement financé par l'Algérie dans le cadre de ses efforts pour accéder aux marchés d'Afrique de l'Ouest à travers le Sahel, et pour éviter une escalade militaire avec le Maroc. Ce chantier a été lancé après que le Maroc a commencé à viser des camions algériens et mauritaniens qui traversent la seule route reliant les deux pays jusqu'à présent à travers le territoire du Sahara occidental, disputé entre le Maroc et le Front Polisario. Auparavant, le cheikh a également appuyé de tout son poids les initiatives de paix de l'Algérie dans la région, comme au Darfour au Soudan et au Mali en s'appuyant sur le réseau de l'ordre dans ces pays. Il est également intervenu personnellement pour faciliter la logistique du transport aérien de milliers de supporters algériens entre les deux pays pour le match de football de 2009 à Omdourman au Soudan, dans le cadre des éliminatoires de la coupe du monde 2010 contre l'Égypte.

Réactiver la Tradition : al-Maghīlī, nouvel ambassadeur de “l’islam des ancêtres” au service de l’État-nation

Tout en avançant sur ces deux terrains litigieux, les autorités algériennes se sont également employées à promouvoir le pays comme le protecteur de la Qadiriyya. Bien que cette confrérie ait vu le jour à Bagdad au XIe siècle, les autorités algériennes ont intensifié leurs efforts pour revendiquer l'héritage local de l'ordre. Ces efforts procèdent essentiellement par le biais d'un récit centré sur une autre figure historique locale sur laquelle cette revendication ne serait pas aussi facilement contestée que dans le cas de Tījānī: Muḥammad Ibn ‘Abd al-Karīm al-Maghīlī. Né à Tlemcen, aujourd'hui en Algérie, cet érudit du XVe siècle, qui prêchait une interprétation étroite de la Charia, fut expulsé de Fès pour ses diatribes cinglantes - en particulier contre les juifs - avant de trouver refuge dans le Touat, dans le Sahara, région qui fait également aujourd'hui partie de l'Algérie. C'est là qu'il décrété le djihad contre la communauté juive locale, provoquant sa disparition après plusieurs siècles de présence[11]Pour l'héritage d'al-Maghīlī dans le Touat, voir John Hunwick, Jews of a Saharan Oasis : Elimination of the Tamantit Community, Princeton, Markus Wiener Publishers, 2018.. Même si la promotion de cet héritage peut surprendre, notamment pour le public occidental où al-Maghīlī est souvent présenté comme un fanatique, il n'en reste pas moins que l'héritage de cet érudit constitue un atout précieux sur ce terrain de l'influence religieuse. Ces dernières années, les autorités algériennes ont commencé à promouvoir cette figure religieuse pré-moderne comme l'incarnation par excellence de « l'Islam des ancêtres » partagé par les musulmans sahéliens et maghrébins à travers le Sahara. À cet égard, l'érudit musulman est souvent cité pour son rôle clé dans l'introduction de la Qadiriyya au Sahel par l'intermédiaire des peuples autochtones, en particulier les Kunta, les Touaregs, les Peuls et les Haoussas. L'héritage d'al-Maghīlī est en effet connu pour son rôle de conseiller auprès des souverains musulmans locaux de la région, dont le plus célèbre est Askia Mohamed de Songhaï, un souverain de l'actuel Mali et Niger, qui comprenait également des territoires au Nigeria, au Bénin, au Burkina Faso et en Gambie[12]Voir Abd-Al-'Azīz 'Abd-Allah Batrān, « a Contribution to the Biography of Shaikh Muḥammad Ibn 'Abd-Al-Karīm Ibn Muḥammad Al-Maghīlī, Al-Tilimsānī », The Journal of African History, 14 … Continue reading.

Soucieuses de propulser cette nouvelle ligne dans leur projet de diplomatie religieuse et d'affirmer l'Algérie comme l'interlocuteur privilégié des représentants de cette puissante confrérie aux ramifications multiples dans la région, les autorités algériennes ont lancé en grande pompe un forum international qui s'est tenu à Alger en décembre 2022 sous le slogan « L'imam Muḥammad Ibn ‘Abd al-Karīm al-Maghīlī : gouvernance et stabilité pour les sociétés africaines et leur unité ». L'événement, officié par de hauts responsables algériens en charge des affaires religieuses, aux côtés d'autres départements tels que la diplomatie et la culture, a rassemblé des dizaines d'universitaires et de chefs religieux du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest. La plupart de ces invités, dont certains se réclament de la descendance d'al-Maghīlī, occupent également d'éminentes fonctions politiques locales, à l'instar de Hadji Ibrahim Oumarou, sultan honorifique de l'Aïr (Agadez) au Niger. Certains ont même été reçus par le président Tebboune en personne. Des figures locales de la confrérie en Algérie, notamment du Touat, terre d'adoption d'al-Maghīlī, ont été invitées à servir de relais à l'ambition des autorités centrales de réorganiser cet ordre transnational et le placer sous la tutelle de l'État algérien. D'autres références locales ont également été mobilisées, comme le sanctuaire du cheikh à Zaouiet Kounta, toujours dans le Touat, rénové à cette occasion et figurant sur le logo officiel de l'événement (Figure 2). Ce forum a été suivi par une série d'annonces, de la création d'un centre de recherche international à la tenue d'une semaine culturelle annuelle dédiée à l'héritage d'al-Maghīlī ainsi qu'un prix éponyme destiné à encourager les initiatives cultivant son héritage à travers le Sahara.

Figure 2 : Logo officiel du colloque international 2022 sur al-Maghīlī, représentant le sanctuaire du savant à Zaouiat Kounta dans le Touat, ainsi que le symbole national, le monument des martyrs d'Alger, et un minaret de style sahélien. Source : domaine public.

 

Partir pour mieux revenir

Pour ces acteurs soufis sahéliens, participer à des réseaux transnationaux soutenus par des initiatives étatiques qui promeuvent des discours religieux au service des intérêts séculiers d'États-nations - auxquels ils n'appartiennent pas - représente une occasion unique d'accéder à des ressources qui leur permettent de mieux faire face aux défis qu’ils rencontrent dans leur cadre national respectif. Pour ceux qui ont été attirés par l’appel de l'Algérie, il ne s'agit pas tant de servir de faire-valoir de la quête de soft power des dirigeants du pays mais plutôt de passer d’un statut de parias dans leur contexte national, marqué par une définition de la modernité dominée par des discours séculiers hégémoniques à celui de « champions de l’Islam ». Pour beaucoup de ces soufis qui se sont retrouvés en marge de leurs sociétés respectives, le projet algérien, en ancrant la tradition religieuse au cœur d'un projet moderne parrainé par un État-nation, représente une forme de réhabilitation. En souscrivant à un tel projet défendant une tradition religieuse locale qui aurait prévalu jusqu'à l'avènement de la modernité politique avec le colonialisme européen, ils se trouvent réhabilités par la restauration d'un « ordre Islamique » qui consacre de nombreux discours, pratiques et références dont ils se sont longtemps auto-proclamés seuls détenteurs. Cela dit, le fait de célébrer le retour d'un monde « enchanté » n’empêche en rien ces soufis de soumettre ce projet à la validation de leurs considérations pragmatiques. A titre d’exemple, certains font montre d’un savant opportunisme politique, participant volontiers à ces initiatives tandis qu’ils continuent à adhérer en parallèle à des projets concurrents proposés par d’autres États, en fonction du contexte et des intérêts.

Sālim Najīm fait partie de ces musulmans qui ont salué le virage de l'Algérie vers le soufisme. Lors de l'événement de 2022 consacré à al-Maghīlī, ce leader nigérien de la Qadariyya a tenu à louer le rôle positif de l'Algérie dans la « promotion de la stabilité régionale » grâce à son engagement en faveur de l'islam des ancêtres, prétendument sauvegardé dans la pensée d’al-Maghīlī. Portant une écharpe aux couleurs de l’Algérie autour du cou, il était particulièrement enclin à célébrer la nouvelle ère inaugurée par le projet de diplomatie religieuse de l’Algérie qui sert, selon lui, l'ensemble de la Oumma, la communauté universelle de l’Islam, au-delà de l’Algérie. Devant les caméras du service de presse officiel du pays, le leader nigérien, présenté comme un descendant d’al-Maghīlī, a exprimé en arabe sa gratitude aux autorités algériennes pour avoir sauvegardé le « vrai » islam menacé par d'autres versions de l'islam prétendument dévoyées par le fanatisme religieux – une référence au salafisme - et la modernité séculière. L'interview a également été diffusée sur les nouveaux médias internationaux destinés à promouvoir le projet religieux algérien auprès des publics subsahariens :

Depuis l'âge de dix ans, je rêve de ce moment, de vivre un tel moment de consécration au niveau officiel de notre ancêtre. Al-Maghīlī nous a enseigné la religion légitime (al-dīn al-samaḥ) de nos ancêtres, des Salafs [les premières générations bien guidées, défiant ainsi les Salafis sur cette revendication], et non la frivole (al-ṭā'ish) qu'ils [vraisemblablement les libéraux] osent appeler islam et dont nous sommes tristement témoins tout autour de nous. C'est pourquoi, au nom de nos quatre cents familles descendantes d'al-Maghīlī au Niger... et ailleurs, nous remercions l'Algérie d'avoir sauvegardé notre patrimoine commun[13]« Salīm Najīm, Hafīd al-Imām Ibn ‘Abd el-Karīm al-Maghīlī », Algerian Press Services, 22 décembre 2022, [en ligne] https://youtu.be/Tz0u-rB69dM?si=0SE67sY2J9XXiTv9..

La quête de réinsertion sociale est l'une des principales raisons qui poussent ces musulmans soufis à quitter leur pays d'origine pour – non sans une certaine ironie « mieux revenir », que ce soit en tant que musulmans ou en tant que citoyens de leurs État-nations respectifs. Parmi ces publics, on compte notamment des centaines d'étudiants venus de tout le Sahel qui ont récemment bénéficié de bourses de l'État algérien pour suivre une formation religieuse dans le pays. La plupart de ceux qui fréquentent ces institutions religieuses, qu'il s'agisse d'établissements publics ou de madrasas soufies privées bénéficiant du soutien de l'État, viennent de régions du Niger, comme Agadez, et du Mali, comme Kidal, qui sont limitrophes de l'Algérie. Ces régions, qui comptent parmi les moins développées de leur pays, sont également secouées depuis longtemps par des épisodes de séparatisme alimentés par des tensions ethnolinguistiques. La plupart de ces conflits ont opposé les communautés touaregs et arabes, qui ont traditionnellement cultivé des liens étroits avec l'État algérien depuis l'indépendance, à d'autres groupes qu’ils accusent d'accaparer les ressources nationales en contrôlant l'État central[14]Pour le cas d’Agadez, voir Youssoufou Hamadou Daouda, « Conflits armés, inégalités et pauvreté : quelles interactions dans la région nord du Niger? », Revue d'Économie Régionale & … Continue reading.

La plupart des plus jeunes de ces étudiants ne sont pas titulaires d'un diplôme d'État ou ont été déscolarisés ou se trouvant en échec scolaire dans leur pays avant leur arrivée en Algérie. Dans la plupart des cas, comme celui de Hassan (Figure 3), ce sont leurs familles qui les ont inscrits dans ces institutions religieuses pour « servir l'islam », une manière d’atténuer la honte de ce qu'elles considèrent comme un échec social et pour leur offrir une alternative encore valorisée dans leurs communautés soufies d'origine. Ces opportunités véhiculées par des réseaux religieux translocaux agissent donc comme une bouée de sauvetage offrant à ces publics une chance de réinsertion sociale à leur retour. En outre, ces ressources sont souvent contrôlées par des figures religieuses locales ou des instructeurs de madrasas qui ont développé des liens étroits avec leurs homologues algériens à la suite des nombreux événements internationaux soufis que l'Algérie a récemment organisés.

Figure 3 : Hassan, un étudiant musulman Qadiri de Kidal, en récréation, devant l'entrée de la madrasa du sanctuaire de Shaikh al-Maghīlī à Zaouiat Kounta, Touat, en cours de rénovation. Source : photographie de l'auteur.

Pour les plus érudits de ces publics, notamment les oulémas, partir à l'étranger leur permet de « revenir » à une tradition locale qu'ils considèrent comme menacée chez eux. Dans ces lieux d'enseignement religieux algériens, ces aspirants savants religieux du Sahel reçoivent une formation basée sur des préceptes et des pratiques jugés conformes à l'islam des ancêtres. Parmi ces préceptes ancestraux, figure par exemple la méthode canonique Warsh de récitation du Coran, la tradition juridique exclusivement basée sur le rite Malékite, et bien sûr, une discipline éthique soufie basée sur des sources de référence, souvent originaire d’Afrique du Nord. Ces trois aspects fondamentaux de l'islam des ancêtres sont de plus en plus remis en question dans le pays avec la montée en puissance d'autres mouvements religieux, à commencer par le salafisme. Ces acteurs religieux, prétendument sponsorisés par d'autres États, notamment du Golfe, tendent à imposer des interprétations alternatives de l'islam présentées comme venant de l'extérieur de la région, au détriment des approches traditionnelles, en particulier dans les milieux urbains. Ces discours et pratiques hégémoniques incluent la méthode Ḥafs pour la récitation du Coran, le tajdīd (renouvellement de l'interprétation) contre le taqlīd pour les questions juridiques, une pratique considérée dans la plupart des milieux salafis comme une « imitation aveugle » des prédécesseurs, ainsi que des positions anti-soufies, considérées par la plupart des salafis comme une forme de polythéisme, ou shirk.

L'accès à l'infrastructure d'États plus développés que le leur, comme l’Algérie, qui présente l’Indice de Développement Humain (IDH) le plus élevé d’Afrique continentale, offre également à ces populations la possibilité de sécuriser un statut social chez eux en jouant le rôle d'intermédiaires entre leurs communautés d'origine et leurs partenaires étrangers, renforçant ainsi leur statut de citoyens. Pour la plupart d'entre eux, souvent originaires de régions périphériques, une telle dynamique leur offre la possibilité de s'affirmer comme intermédiaires incontournables entre leurs autorités centrales d'une part et leurs homologues algériens d'autre part. Outre des fonctions de représentation publique, cette intermédiation s'étend à un large éventail d'aspects, y compris le pouvoir discrétionnaire de décision sur l'allocation de ces ressources financières dans leurs communautés respectives, incluant les bourses d'études. Ce rôle leur permet également de contribuer à émanciper leurs communautés respectives en favorisant leur accès à ces ressources, transformant leur rôle de simples intermédiaires à véritable ascenseur social.

Conclusion

Cet article analyse certaines dynamiques à l'ère de la diplomatie religieuse permettant à des communautés soufies de faire face aux défis croissants posés par la crise de l’État-nation dans le Sahel. Celui-ci montre, à travers cette étude de cas sur la diplomatie religieuse naissante de l'Algérie, comment l'adhésion à des réseaux transnationaux soutenus par des États qui promeuvent un discours religieux prônant la restauration d’une tradition locale permet à ces citoyens musulmans de faire face à la crise de l'État dans leurs contextes nationaux respectifs et de renforcer leur posture publique vis-à-vis de leurs adversaires, qu'ils soient religieux ou non. De manière plus générale, ce discours renvoyant à un « islam des ancêtres » offre une alternative à une modernité politique en crise, perçue comme le produit de modèles séculiers hégémoniques d'inspiration occidentale, consacrés par l'État-nation postcolonial et accélérés par la mondialisation actuelle. Cette dynamique renforce également la capacité de ces soufis à faire face à des mouvements réformistes, tels que le salafisme, considérés comme étrangers et accusés d'être à l'origine de la montée de la violence religieuse. En interrogeant les dynamiques religieuses en cours au croisement de questions politiques et socio-économiques au niveau régional, et en résonance avec le contexte sécuritaire plus large, cette étude appelle tous ceux qui s'intéressent à l'islam contemporain et aux sociétés musulmanes au Sahel et au-delà à une plus grande attention à la manière dont les musulmans contemporains tentent de concilier identités religieuse et politique dans le contexte séculier de l'État-nation.

Notes

Notes
1 Concernant le lien entre la montée du djihadisme et l'affaiblissement de l'État au Sahel, voir une étude de cas comparative sur le Mali et le Burkina Faso : Clionadh Raleigh, Héni Nsaibia & Caitriona Dowd, « The Sahel Crisis since 2012 », African Affairs, 120, 2021, pp. 123-143.
2 Voir, à titre d'illustration, le cas de la destruction des sanctuaires soufis de Tombouctou : Oumar Ba, « Contested Meanings : Timbuktu and the Prosecution of Destruction of Cultural Heritage as War Crimes », African Studies Review, 63 (14), 2020, pp. 743-762.
3 Le salafisme ou "salafiyya" est un mouvement réformiste musulman. La plupart des non-Salafis considèrent Muḥammad Ibn ‘Abd al-Wahhāb (d. 1792), un érudit réformiste du Najd, dans l'actuelle Arabie saoudite, comme le fondateur du mouvement. C'est pourquoi beaucoup, à commencer par les soufis, préfèrent utiliser le terme « wahhabis » pour désigner les salafis. La plupart des salafis, qui se désignent généralement comme Ahl al-Sunna wal-Jamā‘a, s'affirment comme les héritiers de la communauté musulmane fondatrice (al-Salaf al-Ṣāliḥ, ou "génération bien guidée"). Pour l'opposition entre soufis et salafis à l'ère du djihadisme dans une perspective globale, voir Mark J. Sedgwick, "Sufis as 'Good Muslims'. Sufism in the Battle Against Salafi Jihadism", dans Sufis and Salafis in the Contemporary Age, Lloyd Ridgeon, ed. (New York : Bloomsbury Publishing, 2015), 105-117.
4 Pour des études de cas sur les soufis et l'éducation dans le contexte sahélien contemporain, voir Corinne Fortier, “Orality and the Transmission of Qur'anic Knowledge in Mauritania", et Abdoulaye Sounaye, "Walking to the Makaranta : Production, Circulation, and Transmission of Islamic Learning in Urban Niger ", dans Robert Launay (dir.), Islamic Education in Africa, Bloomington, Indiana University Press, 2016, pp. 61-78, pp. 234-267.
5 L'ordre Qadiriyya est, avec la Tijaniyya, son principal rival au Sahel, le mouvement soufi le plus répandu au Sahel. Pour les racines historiques de cet ordre soufi dans la région, voir Abdal Aziz Batran, “An Introductory Note on the Impact of Sidi Mukhtar al-Kunti (1729-1811) on West African Islam in the 18th and 19th Centuries", Journal of the Historical Society of Nigeria 6, no. 4 (1973), pp. 347-352.
6 Pour une vue d'ensemble de la crise politique algérienne des années 1990, voir Martin Evans & John Phillips (dir.), Algeria : Anger of the Dispossessed, New Haven, Yale University Press, 2007, Luis Martinez, The Algerian Civil War, 1990-1998, New York, Columbia University Press, 2000, Michael Willis, The Islamist Challenge in Algeria, A Political History, New York, New York University Press, 1997, et James D. Lesueur, Between Terror and Democracy, Algeria Since 1989, New York, Zed Books Ltd, 2010.
7 Pour le lien entre les groupes militants algériens et le Sahel, voir Alexander Thurston, Jihadists of North Africa and the Sahel Local Politics and Rebel Groups, Cambridge, Cambridge University Press, 2000.
8 Sur la stratégie Tijani du Maroc en Afrique de l'Ouest, voir Yousra Hamdaoui & Bakary Sambe, « Des Usages du Soft Power Religieux du Maroc sous le Règne de Mohammed VI », Afrique(s) en Mouvement 1 (1), 2019, pp. 19-29.
9 L'idée de wasatiyya découle d'une référence coranique à la communauté musulmane en tant que « nation du milieu », dans le sens de modérée et tolérante. Pour une étude de cas sur la wasatiyya au Sahel, voir Jacob Zenn, « The Islamic State in West Africa Province » dans Unmasking Boko Haram : Exploring Global Jihad in Nigeria, Boulder, Lynne Rienner Publisher, 2020, pp. 255-318.
10 Pour le contexte de l'Afrique de l'Est, voir Rüdiger Seesemann, « African Islam or Islam in Africa ? Evidence from Kenya”, dans Roman Loimeier & Rüdiger Seesemann (dir.), The Global Worlds of the Swahili, Berlin, Lit-Verlag, 2006, pp. 229-250.
11 Pour l'héritage d'al-Maghīlī dans le Touat, voir John Hunwick, Jews of a Saharan Oasis : Elimination of the Tamantit Community, Princeton, Markus Wiener Publishers, 2018.
12 Voir Abd-Al-'Azīz 'Abd-Allah Batrān, « a Contribution to the Biography of Shaikh Muḥammad Ibn 'Abd-Al-Karīm Ibn Muḥammad Al-Maghīlī, Al-Tilimsānī », The Journal of African History, 14 (3), 1973, pp. 381-394.
13 « Salīm Najīm, Hafīd al-Imām Ibn ‘Abd el-Karīm al-Maghīlī », Algerian Press Services, 22 décembre 2022, [en ligne] https://youtu.be/Tz0u-rB69dM?si=0SE67sY2J9XXiTv9.
14 Pour le cas d’Agadez, voir Youssoufou Hamadou Daouda, « Conflits armés, inégalités et pauvreté : quelles interactions dans la région nord du Niger? », Revue d'Économie Régionale & Urbaine, 5, 2011, pp. 831-848. Pour le nord du Mali, voir Marie-Jo Demante, « Crise, développement local et décentralisation dans la région de Gao (Mali) », Afrique Contemporaine 3 (215), 2005, pp. 195-217.
Pour citer ce document :
Brahim Afrit, "Modernes par tradition : réseaux transnationaux soufis, État-nation et diplomatie religieuse au Sahel – Version française". Bulletin de l'Observatoire international du religieux N°50 [en ligne], août 2024. https://obsreligion.cnrs.fr/bulletin/moderne-par-tradition-reseaux-transnationaux-soufis-etat-nation-et-diplomatie-religieuse-au-sahel/
Bulletin
Numéro : 50
août 2024

Sommaire du n°50

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Auteur.e.s

Brahim Afrit – chargé de recherche, Groupe de recherche sur le Sahel, Université de Floride

Article traduit par Anne Lancien

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