Bulletin N°21

septembre 2018

L’orthodoxie grecque en transition ? Le gouvernement Syriza et les relations entre l’Eglise et l’Etat.

Vasilios N. Makrides

Les relations entre l’Eglise et l’Etat en Grèce ont toujours été singulières, voire controversées, notamment depuis l'adhésion officielle du pays à la Communauté économique européenne (soit l’Union européenne actuelle) en 1981. En effet, la Grèce était le premier pays majoritairement orthodoxe à rejoindre cette institution européenne. Si, à cette époque, l'intention de l’Union n'était pas d'homogénéiser tous les États membres, puisque c’est ce qui sera l’objectif du traité de Maastricht en 1992, cette adhésion a toutefois initié divers ajustements en vue de la modernisation nécessaire du pays. Ces évolutions concernaient, entre autres, l'Eglise orthodoxe qui jouissait d’une position prédominante et privilégiée.

Les premiers changements affectant la relation entre l’Eglise et l’Etat sont intervenus en 1974, avec la restauration de la démocratie. Ce fut le début d'un processus de sécularisation modérée, conduit sous un gouvernement conservateur. Il a ensuite été intensifié de 1981 à 1989, durant le premier gouvernement socialiste du Mouvement socialiste panhellénique (Pasok), ce qui a entraîné plusieurs tensions avec l’Eglise. Le but de ce processus n'était pas de combattre ou d'éliminer l'orthodoxie, mais d'atténuer les liens forts qui unissaient l’Eglise et l’Etat, et de rendre la société grecque plus ouverte et plurielle sur le plan religieux et culturel. Toutefois, au début des années 1990, le facteur « orthodoxie » est redevenu très présent et influent dans la sphère publique et dans la politique étrangère en raison de l’effondrement du bloc soviétique, où historiquement un grand nombre des orthodoxes vivaient.

Mais l’arrivée au pouvoir d’un second gouvernement socialiste entre 1996 et 2004 a ravivé avec encore plus de force la question de la séparation entre Eglise et Etat. Du côté de l’Eglise, l’archevêque Christodoulos, primat de l’Eglise orthodoxe autocéphale de Grèce de 1998 à 2008, a tenté de mettre un terme à ces projets et de faire de l’orthodoxie un facteur clé du rôle de la Grèce au niveau communautaire européen et mondial. L’un des conflits majeurs de cette période date de 2000. Il a été largement relayé dans la presse et portait sur le fait que les nouvelles cartes d’identité ne faisaient pas mention de l’appartenance religieuse[1]Voir Isabelle Dépret, « L'Église orthodoxe de Grèce et le “combat” des cartes d'identité (2000-2001)», Archives de sciences sociales des religions, 2005, n° 131-132, p. 27-46..

Chose intéressante, les mesures de sécularisation ont également été maintenues sous le gouvernement conservateur qui a fait suite au Pasok, de 2004 à 2009, et dont la fin a été marquée par le début de la crise économique. Mais l’archevêque d’Athènes et de toute la Grèce, Hieronyme II, successeur de Christodoulos à la mort de celui-ci en 2008, était, à bien des égards, différent de son prédécesseur. Il a ainsi préféré donner une autre image de l'Eglise, basée sur la charité, et éviter les conflits ouverts avec l'Etat, même s'il était en désaccord avec la législation étatique[2]Voir Konstantinos Papastathis, «From Mobilization to a Controlled Compromise: The Shift of Ecclesiastical Strategy under Archbishop Hieronymus», dans Trine Stauning Willert / Lina … Continue reading. Ainsi, au cours des dernières décennies, le processus de sécularisation de la société grecque initié par les dirigeants politiques a été continu, mais avec des degrés variés.

Syriza, une nouvelle donne ?

Cette contribution s’intéresse désormais aux évolutions de cette relation Eglise-Etat depuis janvier 2015 et l’arrivée au pouvoir, en pleine crise économique, de Syriza, une « coalition de la gauche radicale ». Le gouvernement de coalition qu’il a formé avec les Grecs indépendants (AN-EL), un parti populiste de droite, a été réélu en septembre 2015, et est au pouvoir depuis cette période. Inutile de dire que les divergences idéologiques entre ces deux partis sont majeures, bien qu’ils aient réussi à former une alliance qui s’est révélée résistante dans le temps. La prestation de serment du nouveau gouvernement a illustré cette différence, puisque le Premier ministre Alexis Tsipras et la plupart des ministres du Syriza ont choisi un serment politique, alors que tous les ministres de l'AN-EL ont opté pour un serment religieux.

De plus, la rhétorique pro-orthodoxe imprègne le discours public de l’AN-EL. A l’inverse, Syriza compte un grand nombre de militants communistes et socialistes, ainsi que d’autres issus de mouvements indépendants de gauche ; tous ont une position critique, voire négative, à l’égard de la religion. Dans l'Europe postcommuniste, cependant, la religion n’avait pas vocation à être combattue, et on ne s'attendait pas à ce qu'elle disparaisse à la suite de mesures antireligieuses sévères. En Grèce, elle était plutôt perçue par la gauche comme un facteur socialement utile, à condition qu'elle évite les positions fondamentalistes, tandis que l’Eglise fournissait des services sociaux à la population, devenant ainsi un bon instrument au service de l’Etat.

Cependant, le fait qu’il existe une religion privilégiée dans le pays était considéré comme contraire à l'égalité et à la neutralité supposée de l'Etat dans le domaine religieux. D’ailleurs, avant d’être élu, A. Tsipras avait avoué être athée, mais respecter toutes les religions tant qu’elles remplissaient les présuppositions susmentionnées concernant leur rôle public. De fait, depuis qu’il est en poste, le Premier ministre entretient de bonnes relations avec les dirigeants de l'Eglise orthodoxe. Pour preuve, en 2014 il s’est rendu dans la communauté monastique du Mont Athos, un bastion traditionnel de la spiritualité orthodoxe [voir texte n°2].

L'un des engagements de campagne de Syriza était de procéder à la séparation effective de l’Eglise et de l’Etat, c’est-à-dire approfondir les mesures de sécularisation prises par les gouvernements précédents. Malgré cette promesse, au cours de la campagne, et dans le contexte de crise, A. Tsipras a montré un vif intérêt pour le travail caritatif de l'Eglise envers les classes sociales les plus défavorisées, y compris les migrants. Immédiatement après son élection, il a ainsi rendu une visite symbolique à l’archevêque Hieronyme II, ce qui atteste de son intention de conserver de bonnes relations avec l’Eglise.

Partant, une stricte séparation entre Eglise et Etat, selon les modalités souhaitées par la gauche, semble difficile pour plusieurs raisons :

Premièrement, la coexistence du gouvernement avec un parti de droite a rendu impossible la pleine réalisation des plans de la gauche radicale pour l’Eglise et contraint Syriza à divers compromis. Plusieurs crises, comme celle concernant la réforme de l'éducation religieuse dans les écoles en 2016 [voir infra], ont effectivement secoué le gouvernement de coalition sur les questions liées à l'Eglise, ce qui pourrait menacer sa longévité.

Deuxièmement, lors de son arrivée au pouvoir en 2015, les problèmes auxquels devait prioritairement faire face le gouvernement Tsipras étaient liés à la crise économique, et portaient sur les négociations avec les créditeurs internationaux et l’amélioration du niveau de vie des Grecs grâce au développement de l’Etat social. Entrer en conflit avec l'Eglise ou AN-EL était totalement inutile à cette époque. De plus, au cours du premier gouvernement, Syriza a été déchiré par des conflits internes, qui ont contraint la frange la plus radicale à quitter le parti et suivre une voie indépendante[3]Certains de ces membres ont fondé de petits partis, comme Panagiotis Lafazanis qui a créé le nouveau parti « Unité populaire ».. En outre, Syriza a tenté à plusieurs reprises de se tourner davantage vers le centre en développant un caractère social-démocrate. Ce repositionnement politique a affecté son profil radical, notamment ses positions antérieures sur l'Eglise.

Troisièmement, l'Eglise a véhiculé une image très positive pendant la crise en raison des nombreuses activités philanthropiques qu’elle a menées, ainsi que depuis la crise migratoire entamée en 2015. Dans ce contexte, contrer l’Eglise n’est pas stratégique, d'autant plus que l'Eglise est traditionnellement proche de la droite et que pendant la crise, il y a eu des contacts positifs entre des hiérarques de l'Eglise ainsi que quelques autres acteurs orthodoxes, et le parti d'extrême droite Association populaire – Aube dorée (XA)[4]Voir Konstantinos Papastathis, « Religious Discourse and Radical Right Politics in Contemporary Greece, 2010-2014 », Politics, Religion & Ideology, 2015, n°16, p. 218-247.. En conséquence, le gouvernement a préféré féliciter l’Eglise pour son soutien aux Grecs affectés par la crise et aux réfugiés. Symboliquement, A. Tsipras a choisi de se rendre sur l’île de Lesbos lorsque le Pape François, le patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée et l’archevêque Hieronyme II s’y sont rencontrés en avril 2016 afin de sensibiliser le monde à la crise migratoire.

Sous le gouvernement Syriza, les relations Eglise-Etat ont donc présenté différentes facettes, à l’image du parti oscillant entre une idéologie critique vis-à-vis de la religion, et la conduite d’une Realpolitik dans un contexte de crise. De cette manière, il a pris des initiatives sur des questions sociétales restées en suspens sous les gouvernements précédents à cause de l’opposition qu’elles suscitaient, y compris de la part de l’Eglise. Par exemple, un gouvernement précédent avait déjà introduit une loi sur la cohabitation des couples, mais qui ne s’appliquait pas aux couples de même sexe. Cette décision a été condamnée en décembre 2013 par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en raison de son caractère discriminatoire. En dépit de la réaction hostile de l'Eglise grecque, le gouvernement Syriza a appliqué les recommandations de la CEDH et choisit d’étendre cette loi aux couples de même sexe en 2015[5]www.ministryofjustice.gr/site/Portals/0/4356-2015.pdf. Il en va de même pour la construction d’une mosquée à Athènes – une question différée depuis des décennies – ratifiée par le gouvernement Syriza et par le Parlement grec (mais sans AN-EL) en 2015.

Toutefois, certaines crises ont été plus vives. La plus importante est survenue en 2016, à propos de l'éducation religieuse dans les écoles[6]Voir Evanthia Tsaliki, «Religious Education in Greece Under the Scope of Interculturalism», Journal of Education and Training, 2017, vol. 4, n°1, p. 40-54. . Chapeauté par le ministre de l’Education, Nikos Filis, le projet de loi proposait d’abolir le caractère confessionnel orthodoxe de la matière, en réduisant ses heures dans les programmes scolaires et en le rendant facultatif, ce qui a logiquement déclenché de fortes réactions de la part de l’Eglise. Le conflit a été exacerbé par d’autres actions et décisions de ce même ministère, qui donnaient l’impression d’être dirigées contre l’Eglise ; par exemple, interdire aux évêques orthodoxes de visiter les écoles ou supprimer la prière du matin dans ces établissements[7]https://greece.greekreporter.com/2016/09/26/greek-education-minister-i-have-tsipras-support-on-religious-studies-issue/.. La réaction hostile de l’Eglise a été soutenue par AN-EL, ce qui a menacé la coalition gouvernementale. A.Tsipras a donc été contraint de nommer un nouveau ministre de l’Education, Kostas Gavroglou, qui a tenté de panser les plaies, tandis qu’en 2018 le Conseil d'Etat a annulé les changements en matière d’éducation religieuse qu’avait portés l'ancien ministre Filis[8]https://neoskosmos.com/en/112743/changes-in-religion-lessons-unconstitutional-says-greek-state-council/.

Sécularisation timide, mais continue

De façon générale, ce qui est caractéristique de la période Syriza, c'est que se sont ouvertes de nombreuses questions inédites jusqu’à lors en ce qui concerne le rapport de l’Etat à l’Eglise. Cette ouverture des débats découle de l’idéologie de gauche dont sont porteurs les élus et les militants de Syriza, qui ont eu une socialisation antireligieuse la plus grande partie de leur vie. Même si aucun changement drastique ne s’est produit jusqu’à présent, le fait même que de tels débats aient surgi publiquement indique que le gouvernement Syriza n’est pas satisfait de la situation actuelle de l’Église et considère que la Grèce est encore trop soumise au poids de l’institution religieuse. Parmi les points litigieux, citons la suppression des symboles orthodoxes des édifices et espaces publics ; la crémation des morts ; le mariage entre personnes du même sexe ; le droit des homosexuels à adopter des enfants ; l’abolition complète de la prestation de serment religieux pour les ministres ; une plus grande liberté religieuse ainsi que des droits pour les minorités religieuses et les réfugiés ; la laïcisation de l'Etat et une neutralité religieuse plus radicale.

Depuis 2015, certains députés Syriza ont également demandé à plusieurs reprises l'abolition de la tradition selon laquelle on apportait le feu saint de l'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem jusqu’en Grèce avec les honneurs de l'Etat, le jour précédant la fête de Pâques orthodoxe. Ils considéraient cette célébration comme païenne et obsolète, en plus de grever inutilement le budget de l’Etat en ces temps critiques sur le plan financier[9]http://www.keeptalkinggreece.com/2017/04/15/transfer-of-holy-light-divides-greeces-coalition-government/. Cependant, la vive réaction du clergé, mais aussi de divers acteurs politiques et sociaux, a mis un terme à cette proposition et le feu chemine toujours de Jérusalem à Athènes. Le gouvernement a aussi abordé des questions nationales sensibles, par exemple, en relativisant l'importance de l’hymne et du drapeau national grecs dans les écoles, en soutenant le multiculturalisme, ou encore en réformant les manuels scolaires d’histoire dans une perspective non nationale – autant de décisions qui préoccupent également l’Eglise. La question la plus importante a été soulevée en 2018 lors de la signature d’un accord avec l'Etat voisin de Macédoine, dont le nom international officiel est FYROM pour « Former Yugoslav Republic of Macedonia ». La dénomination de la Macédoine est l’objet d’un contentieux identitaire dans la région depuis longtemps, mais, en juin 2018, Skopje et Athènes ont réussi à trouver un accord : le territoire sera appelé « Macédoine du nord » dans le futur[10]http://www.pappaspost.com/the-full-text-of-the-agreement-between-greece-and-the-former-yugoslav-republic-of-macedonia/[voir carte ci-dessous]. L’Eglise, mais également les partis d’opposition, ont désapprouvé l’accord et organisé des protestations, bien que Hieronyme II ait demandé des réactions plus pragmatiques à ce sujet.

Région de macédoine
Cliquez ici pour agrandir l'image

Ainsi, malgré le maintien de relations globalement bonnes avec l'Eglise, Syriza ne peut éviter les sources de tensions, notamment avec certains membres du gouvernement. Nikos Voutsis, le Président du Parlement, a ainsi parlé en 2017 des « talibans de l'orthodoxie » qui réagissent contre les changements nécessaires et la modernisation de l’Eglise. Cette déclaration a provoqué des réactions outrées au sein de l'Eglise et d’AN-EL[11]http://www.pappaspost.com/the-full-text-of-the-agreement-between-greece-and-the-former-yugoslav-republic-of-macedonia/. De plus, en 2017, l'organisation de jeunesse de Syriza a demandé à l'université de Thessalonique de ne pas décerner de doctorat honorifique au métropolite local Anthimos, l'accusant d'obscurantisme[12]http://www.iefimerida.gr/news/377983/neolaia-syriza-kata-anthimoy-sto-apth-ekprosopos-skotadismoy-kai-misallodoxias. Déjà en 2016, des militants antiautoritaires, qui organisent diverses protestations[13](Par exemple, ils envahissent des bâtiments publics et privés ou des entreprises et causant des dommages mineurs)., et sont plutôt tolérés par Syriza, ont envahi la cathédrale de Thessalonique pendant la liturgie de dimanche pour protester contre quelques décisions du diocèse local[14]https://www.cnn.gr/news/politiki/story/41448/mpros-gkremos-kai-piso-royvikonas. A contrario, plusieurs ministres ont critiqué Hieronyme II pour ne pas avoir contrôlé ses évêques militants qui attaquent souvent verbalement Syriza. La bataille entre les deux parties se poursuit donc et se livrera sûrement sur d’autres terrains à l’avenir.

Syriza essaie de poursuivre, même silencieusement, sa politique de sécularisation et de mettre en œuvre des changements à cet égard. En 2018, des protestations ont éclaté contre le ministère de l'Éducation, qui avait supprimé de son organigramme la section sur le développement de la « conscience religieuse » du peuple grec[15]http://newpost.gr/politiki/666303/kontra-ekklhsias-ndash-kybernhshs-gia-th-thrhskeytikh-syneidhsh-toy-ypoyrgeioy-paideias. La même année, la décision du gouvernement de renforcer le contrôle de l'Etat sur la gestion d'un célèbre lieu de pèlerinage sur l'île de Tinos, située dans les Cyclades, a également été vertement critiquée par l’Eglise[16]http://www.iellada.gr/thriskeia/iera-synodos-kata-syriza-kai-potamioy-gia-tin-tropologia-poy-afora-tin-ekklisia-tis-tinoy.

Positionnement modéré de l’archevêque

Du côté de l’Eglise, Hieronyme II a essayé de minimiser le pouvoir politique de l’institution religieuse et a évité de recourir à des méthodes combatives envers l’Etat. Il a critiqué la tentative de marginalisation de l’Eglise dans la société grecque, mais il s’efforce généralement de maintenir un compromis, ce qui a d’ailleurs suscité de nombreuses critiques de la part de certains évêques intransigeants. Ces derniers blâment Syriza pour son caractère athée, et parce qu’ils considèrent que la formation est un ennemi de l’orthodoxie. Par exemple, le métropolite Serapheim du Pirée a vilipendé ce qu’il considère être la libéralisation rampante de la morale[17]https://keeptalkinggreece.wordpress.com/2013/11/28/piraeus-bishop-to-excommunicate-mps-voting-for-same-sex-civil-partnership, et exprimé son opposition à la construction de la mosquée d’Athènes. En outre, le métropolite Amvrosios de Kalavryta a, à plusieurs reprises, qualifié Tsipras d’antéchrist, tout en blâmant sa politique gouvernementale. Il a même considéré les incendies catastrophiques survenus à Athènes en 2018 comme une punition de Dieu causée par l’athéisme de Tsipras et sa législation anti-orthodoxe[18]https://www.thenationalherald.com/208696/greek-bishop-says-atheist-tsipras-brought-fires-wrath-of-god. Des réactions similaires s’opposant à la déchristianisation en cours de la Grèce viennent également du mont Athos, dont la communauté monastique a annulé la visite du Premier ministre en 2017[19]https://greece.greekreporter.com/2017/09/29/pm-tsipras-not-welcomed-in-greeces-holy-mountain-athos. Mais la majorité de la hiérarchie de l'Eglise semble être plus réaliste, bien qu’elle ne soit pas d'accord avec les décisions du gouvernement.

Le gouvernement actuel a encore jusqu’en septembre 2019 pour mener à bien son mandat, à moins que des élections parlementaires aient lieu plus tôt. En juin 2018, le gouvernement a annoncé qu'il prévoyait toujours une réforme constitutionnelle majeure : elle inclurait, entre autres choses, une séparation plus nette entre Eglise et Etat . Syriza va-t-il donc ouvrir un nouveau front majeur avec l'Eglise ? Car cette dernière a déjà officiellement signifié, en 2017, ses positions clés sur cette question devant le gouvernement . La formation conservatrice Nouvelle Démocratie, le principal parti d’opposition, est également contre cette réforme. L’engagement actuel entre Eglise et Etat est donc un processus de négociation continu et le programme de sécularisation engagé par Syriza va se poursuivre.

Des données empiriques récentes montrent également une sécularisation nettement accrue de la jeune génération grecque . La question est de savoir jusqu'où cela va affecter la position de l'Eglise grecque à long terme, alors même que Hieronyme II tente de s'adapter aux défis de la modernité. Quoi qu’il arrive, ces évolutions mettront constamment à l’épreuve la capacité de l’Eglise à s’accommoder ou à se réformer afin de répondre aux nouvelles exigences de la société grecque.

Notes

Notes
1 Voir Isabelle Dépret, « L'Église orthodoxe de Grèce et le “combat” des cartes d'identité (2000-2001)», Archives de sciences sociales des religions, 2005, n° 131-132, p. 27-46.
2 Voir Konstantinos Papastathis, «From Mobilization to a Controlled Compromise: The Shift of Ecclesiastical Strategy under Archbishop Hieronymus», dans Trine Stauning Willert / Lina Molokotos-Liederman (éd.), Innovation in the Christian Orthodox Tradition? The Question of Change in Greek Orthodox Thought and Practice, Farnham 2012, 207-227.
3 Certains de ces membres ont fondé de petits partis, comme Panagiotis Lafazanis qui a créé le nouveau parti « Unité populaire ».
4 Voir Konstantinos Papastathis, « Religious Discourse and Radical Right Politics in Contemporary Greece, 2010-2014 », Politics, Religion & Ideology, 2015, n°16, p. 218-247.
5 www.ministryofjustice.gr/site/Portals/0/4356-2015.pdf
6 Voir Evanthia Tsaliki, «Religious Education in Greece Under the Scope of Interculturalism», Journal of Education and Training, 2017, vol. 4, n°1, p. 40-54.
7 https://greece.greekreporter.com/2016/09/26/greek-education-minister-i-have-tsipras-support-on-religious-studies-issue/.
8 https://neoskosmos.com/en/112743/changes-in-religion-lessons-unconstitutional-says-greek-state-council/
9 http://www.keeptalkinggreece.com/2017/04/15/transfer-of-holy-light-divides-greeces-coalition-government/
10 http://www.pappaspost.com/the-full-text-of-the-agreement-between-greece-and-the-former-yugoslav-republic-of-macedonia/
11 http://www.pappaspost.com/the-full-text-of-the-agreement-between-greece-and-the-former-yugoslav-republic-of-macedonia/
12 http://www.iefimerida.gr/news/377983/neolaia-syriza-kata-anthimoy-sto-apth-ekprosopos-skotadismoy-kai-misallodoxias
13 (Par exemple, ils envahissent des bâtiments publics et privés ou des entreprises et causant des dommages mineurs).
14 https://www.cnn.gr/news/politiki/story/41448/mpros-gkremos-kai-piso-royvikonas
15 http://newpost.gr/politiki/666303/kontra-ekklhsias-ndash-kybernhshs-gia-th-thrhskeytikh-syneidhsh-toy-ypoyrgeioy-paideias
16 http://www.iellada.gr/thriskeia/iera-synodos-kata-syriza-kai-potamioy-gia-tin-tropologia-poy-afora-tin-ekklisia-tis-tinoy
17 https://keeptalkinggreece.wordpress.com/2013/11/28/piraeus-bishop-to-excommunicate-mps-voting-for-same-sex-civil-partnership
18 https://www.thenationalherald.com/208696/greek-bishop-says-atheist-tsipras-brought-fires-wrath-of-god
19 https://greece.greekreporter.com/2017/09/29/pm-tsipras-not-welcomed-in-greeces-holy-mountain-athos
Pour citer ce document :
Vasilios N. Makrides, "L’orthodoxie grecque en transition ? Le gouvernement Syriza et les relations entre l’Eglise et l’Etat.". Bulletin de l'Observatoire international du religieux N°21 [en ligne], septembre 2018. https://obsreligion.cnrs.fr/bulletin/lorthodoxie-grecque-en-transition-le-gouvernement-syriza-et-les-relations-entre-leglise-et-letat/
Bulletin
Numéro : 21
septembre 2018

Sommaire du n°21

Voir tous les numéros

Auteur.e.s

Vasilios N. Makrides, professeur d’études religieuses – Université d’Erfurt (Allemagne)

Mots clés
Pays :
Aires géographiques :
Aller au contenu principal