Bulletin N°35

janvier 2022

L’Union européenne, les Églises orthodoxes et la crise des réfugiés – Version française

Lucian N. Leustean

En novembre 2021, des milliers de réfugiés et de demandeurs d’asile se sont trouvés piégés à la frontière bélarusso-polonaise. Ils n’avaient qu’un objectif : traverser la frontière pour atteindre l’Union européenne (UE). Les franchissements illégaux ne sont pas rares. Cependant, les événements qui se déroulèrent alors à cette frontière combinèrent un savant mélange d’émotion, de religion et de géopolitique. Le drame des réfugiés en provenance du Moyen Orient, dont certains perdirent la vie dans les forêts situées à proximité de la frontière, contrasta avec les tensions qui opposèrent les autorités européennes et le régime politique bélarusse, relatives en particulier au manque de légitimité politique de ce dernier.

L’arrivée des réfugiés rappela au souvenir des scènes similaires, qui s’étaient déroulées seulement quelques années auparavant, dans le sud-est de l’Europe. Au sommet de la crise en 2015, ils étaient des centaines de milliers à traverser la mer Égée pour atteindre l’Union européenne. Au cours de leur périple vers l’ouest, comme en Biélorussie, les réfugiés ont dû composer avec une religion dominante et un contexte culturel spécifique des pays dans lesquels ils séjournèrent. Qu’il s’agisse de la Biélorussie, de la Grèce, de la Bulgarie ou de la Serbie, tous sont des pays dans lesquels les chrétiens orthodoxes d’Orient sont majoritaires et dans lesquels la religion joue un rôle important dans la définition de l’identité nationale et de l’édification de l’État. Les récits populaires sur l’ « autre » et l’image de l’ « autre » en ont été des caractéristiques constantes, depuis l’émergence des États modernes. En règle générale, dans la région, les réfugiés ont été appréhendés par les Églises orthodoxes comme fidèles d’une autre religion (l’islam), qui pourrait déstabiliser le statu quo et la structuration religieuse de leurs sociétés. Leur arrivée est acceptée avec prudence, tant qu’ils ne manifestent pas d’intention de rester, mais davantage de poursuivre leur périple vers l’Europe de l’Ouest et du Nord.

Selon quelles modalités les Églises orthodoxes, en tant que structures institutionnelles, ont-elles été impliquées dans la question des réfugiés ? Dans quelle mesure les représentations bruxelloises des Églises orthodoxes ont-elles collaboré avec les responsables européens pour résoudre ce que l’on appelle « la crise des réfugiés » ? Dans quelle mesure les discours sur la migration et les déplacements forcés sont-ils liés aux récits géopolitiques sur le pouvoir et les relations interétatiques dans le monde de l’orthodoxie orientale ? Ces trois interrogations sont liées et seront explorées dans cet article.

La réponse orthodoxe à la crise des réfugiés

Les données fournies par les organisations internationales sur les déplacements internationaux sont surprenantes. En 2015, le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies déclara que « un homme sur 122 est désormais soit un réfugié, soit une personne déplacée à l’intérieur de son propre pays, soit un demandeur d’asile[1] ». En 2020, les déplacements forcés touchaient plus de 80 millions de personnes à travers le monde[2]. Plus important encore, les déplacements forcés ne constituent pas un mouvement sans heurts, de populations évoluant simplement d’un lieu à un autre. Comme Elena Fiddian-Qasmiyeh et al. l’indiquent, « deux-tiers des réfugiés et personnes déplacées vivent dans une situation d’exil durant plus de cinq années, parfois sur plusieurs générations, sans solutions en perspective[3] ».

Dans le cadre de deux projets scientifiques soutenus par la British Academy, nous avons mené de 2018 à 2020 soixante-dix entretiens avec des réfugiés, des responsables étatiques et des organisations religieuses dans six pays, à savoir l’Arménie, la Bulgarie, la Géorgie, la Moldavie, la Serbie et l’Ukraine[4]. En juin 2018, nous avons pu mener des entretiens au sein d’un centre d’accueil pour migrants et réfugiés, le centre Principovac, situé à seulement quelques centaines de mètres de la frontière serbo-croate. Les résultats de mes entretiens en Serbie présentaient une étrange similitude avec les enquêtes menées par de nombreux journalistes auprès des réfugiés en Biélorussie quelques années plus tard.[5]. Dans un cas, une famille afghane, composée d’un père, d’une mère et de leur fille, racontait qu’elle vivait dans le centre de Principovac depuis les deux dernières années. La famille a tenté de traverser illégalement la frontière à quelques reprises, seule leur seconde fille et son enfant y sont parvenus et vivent désormais en Allemagne. La famille refusait de rentrer en Afghanistan et espérait être en mesure un jour de poursuivre son périple, afin de vivre en Allemagne. Dans un autre cas, un Iranien d’une vingtaine d’années racontait avoir été récemment diplômé de premier cycle de l’Université de Téhéran. À la suite d’un conflit familial, il partit à la recherche d’une vie meilleure au sein de l’Union européenne. Il voyagea vers la Serbie grâce à un visa touristique, resta quelques nuits dans un hôtel de Belgrade, et essaya sans succès de traverser la frontière. Il essuya la violence des garde-frontières mais resta convaincu qu’atteindre l’ouest demeurait la seule solution. Il affirmait être athée et qu’il serait persécuté s’il retournait en Iran. Ces deux histoires illustrent le drame personnel vécu par les réfugiés bloqués aux frontières et leur incertitude quant à la conduite à adopter par la suite. Poursuivre leur périple ou rentrer dans leur pays d’origine ne sont pas toujours les deux seules options.

Ce qui ressortit de notre visite au sein du centre d’accueil de Principovac fut l’importante coopération entre communautés orthodoxes et catholiques. Elles proposaient une réponse aux besoins fondamentaux des populations nécessiteuses. Qu’il s’agisse d’apporter conjointement un modeste soutien financier, susceptible d’aider les habitants du camp à acheter des produits locaux de première nécessité, ou de leur permettre de voir régulièrement des personnes familières avec lesquelles ils pouvaient partager leur histoire, les communautés orthodoxes et catholiques évoluaient sur des terrains dans lesquels les autorités étatiques n’étaient pas capables ou ne souhaitaient pas intervenir.

Au-delà de cet exemple, le nombre croissant de réfugiés en Serbie ne s’explique pas uniquement par la guerre au Moyen-Orient, mais également, fait plutôt rare, par le changement soudain de la libéralisation des visas touristiques avec l’Iran en août 2017. Lors d’un entretien mené à Belgrade, une personne nous expliqua que la politique de libéralisation des visas était inattendue et présentée dans les grands médias comme un geste de gratitude envers l’Iran, pour ne pas avoir reconnu l’indépendance du Kosovo. Cette même personne souligna que la décision était à l’évidence liée à la visite d’autorités serbes à Moscou et que, selon elle, cette politique répondait plus que probablement à des enjeux géopolitiques, liés aux relations étroites entre la Serbie et la Russie, à l’inverse des relations tendues entre la Russie et l’UE. En octobre 2018, après que 7 000 Iraniens arrivèrent en Serbie en tant que touristes, nombre d’entre eux ne parvinrent pas à rentrer en Iran et commencèrent à vivre dans des camps de réfugiés ; en raison de pressions de l’UE, la libéralisation des visas avec l’Iran fut annulée[6].

Au-delà de l’analyse politique concernant l’accueil d’Iraniens avec visas touristiques en Serbie en 2017 et 2018, la crise des réfugiés fut appréhendée par les personnes avec lesquelles des entretiens furent menés comme un affrontement idéologique entre les valeurs défendues par l’Union européenne et le traditionalisme avancé par les communautés orthodoxes locales. Ceci s’illustra en septembre 2015 par le geste sans précédent du Saint Synode de l’Église orthodoxe bulgare qui publia un document officiel condamnant la politique migratoire et d’asile de son propre gouvernement et de l’Union européenne, en demandant aux autorités de ne plus accueillir de réfugiés syriens. Le document déclarait que « cette arrivée massive est devenue [une] quasi-invasion[7] », oubliant ainsi le drame personnel que vit chacun de ces individus. Cette position devint évidente lorsque, en mai 2019, le Pape François vint à Sofia et rencontra des hiérarques orthodoxes, implorant les dirigeants et les fidèles d’apporter leur soutien aux populations dans le besoin. Une photographie du Pape François priant seul dans la cathédrale Alexandre Nevsky fit les gros titres du monde entier, résumant les réponses divergentes entre catholiques et orthodoxes dans le traitement de la crise humanitaire[8].

Les Églises orthodoxes ne s’identifient pas toutes aux modèles serbe et bulgare. Institutionnellement, les Églises orthodoxes ont soit accueilli, condamné ou se sont abstenues de s’engager auprès des réfugiés. Cependant, il faut souligner que, dans de nombreux cas, les structures institutionnelles ont été dépassées par la mobilisation des croyants orthodoxes, qui ont agi au nom de valeurs humanitaires plutôt que de suivre leur appartenance religieuse. En Bulgarie, des bénévoles ont travaillé avec l’organisation caritative Caritas (catholique) et des organismes de la société civile en apportant un soutien aux réfugiés, plutôt que par l’intermédiaire d’un réseau national de solidarité structuré depuis des paroisses orthodoxes. D’autres organisations ont étendu leurs programmes existants et les ont adaptés aux nouveaux défis soulevés par la crise des réfugiés. Par exemple, en 2012, l’Église orthodoxe de Grèce a mis en place un centre d’intégration pour travailleurs migrants – l’Ecumenical Refugee Programme, un an après le début de la guerre civile syrienne. Le centre a été développé par une organisation humanitaire fondée par l’Église en 1978, avec pour objectif de réintégrer des travailleurs migrants, revenant d’Allemagne vers la Grèce. Ce programme a été soutenu financièrement par le Saint Synode de l’Église orthodoxe de Grèce, le fonds européen pour les réfugiés et le Haut-commissariat aux réfugiés et fournit du soutien matériel aux réfugiés séjournant sur les îles grecques. En 2020, le programme permettait le déploiement de six centres pour mineurs non accompagnés, soit 240 enfants âgés de 6 à 17 ans évoluant seuls[9]. Cependant, alors que l’aide institutionnelle apportée par la Grèce a montré de réels résultats, le pays a dû surmonter diverses difficultés, liées plus particulièrement à la nécessité de dissiper tout malentendus et préjugés au sujet de « l’autre ». L’illustration la plus récente en est celle de « Petite Amal », une marionnette géante de 3,5 mètres qui symbolise et reprend le périple de réfugiés traversant l’Europe depuis la Turquie vers la Grande Bretagne en 2021. À Larissa, en Grèce, elle a été la cible de jets de pierre par des groupes d’extrême droite et les organisateurs du projet artistique ont préféré éviter un itinéraire passant à proximité de monastères orthodoxes, craignant que des orthodoxes traditionnalistes n’accentuent davantage les tensions[10].

Les représentations orthodoxes et les institutions européennes bruxelloises

En mars 2010, cinq Églises orthodoxes disposant de bureaux à Bruxelles ont créé le « Comité des représentants des Églises orthodoxes au sein de l’Union européenne » (CROCEU). En 2020, le comité regroupait six Églises : le Patriarcat œcuménique de Constantinople, l’Église orthodoxe russe, l’Église orthodoxe roumaine, l’Église orthodoxe bulgare, l’Église orthodoxe chypriote et l’Église orthodoxe grecque. À l’origine, la mise en place d’un comité représentant l’obédience orthodoxe, séparément des autres représentations chrétiennes à Bruxelles, fut accueillie avec prudence par leurs homologues. Jusqu’en 2010, les Églises orthodoxes étaient, et nombre d’entre elles le demeurent, membres d’une plus large organisation œcuménique, la Conférence des Églises européennes, qui a une longue histoire de présence religieuse auprès des institutions européennes. Le comité, qui se réunit régulièrement, se voit lui-même comme le produit de l’application de l’article 17 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne tel qu’amendé dans le traité de Lisbonne de 2009 et qui encourage « un dialogue régulier et transparent entre les institutions européennes et les organisations religieuses ».

Une vue d’ensemble des réunions du CROCEU montre que les questions migratoires et de la crise des réfugiés sont restées largement extérieures à l’agenda de celui-ci. L’absence d’une mobilisation orthodoxe coordonnée s’explique par l’impact des relations spécifiques à chaque pays entre religion et État sur la gestion des affaires courantes à Bruxelles. Deux récents documents publiés en 2016 et 2020 nuancent ce constat. La majorité des représentations orthodoxes à Bruxelles (la Russie fait exception) se réfère à l’Encyclique du saint et grand concile de l’Église orthodoxe, qui a été approuvé par seize Églises en Crète en 2016. L’Encyclique avance un message fort qui encourage à ce que « nous appel[i]ons les autorités politiques, les fidèles orthodoxes et les citoyens des pays d’accueil, vers lesquels les réfugiés ont afflué et continuent d’affluer, à leur procurer toute aide possible dans la mesure de leurs moyens[11] ». Le patriarche œcuménique alla même plus loin et soutint la publication de la première réflexion sur les réponses orthodoxes apportées aux réfugiés et personnes déplacées à travers le monde (For the Life of the World: Towards a Social Ethos of the Orthodox Church, 2020), en fournissant des exemples spécifiques de mauvais traitements sociaux et politiques, avancés comme « des offenses envers l’Esprit Saint[12] ».

L’engagement limité du CROCEU dans la crise des réfugiés apparaît évident au regard du nombre de déclarations adoptées à l’issue de réunions entre hauts fonctionnaires. En juillet 2018, les représentants du patriarche œcuménique, de l’Église orthodoxe russe et de l’Église orthodoxe chypriote ont rencontré le ministre fédéral autrichien en charge des questions européennes et ont débattu de la présidence autrichienne de l’Union européenne. Un résumé de la rencontre précisait que « le CROCEU a exprimé sa préoccupation quant à la gestion des questions migratoires et des réfugiés et a réaffirmé l’importance de défendre des politiques plus humaines, qui soutiennent les valeurs de l’Europe ». L’importance accordée à la « préoccupation » et aux « valeurs de l’Europe » resta floue et fut réaffirmée lors de deux autres réunions[13]. En octobre 2018, lors de « la rencontre annuelle de haut niveau avec les dirigeants des communautés religieuses », organisée en conformité avec l’article 17 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le métropolite d’Achaïe, Athanasios (Chatzopoulos), dirigeant de la représentation de l’Église orthodoxe de Grèce au sein de l’UE, proposa qu’un grand congrès soit organisé dans chaque pays membre au sujet des « valeurs communes européennes et des traditions en Europe ». Il suggéra que le premier congrès se déroule à Athènes afin de discuter de la façon dont les Églises et États pourraient condamner « le fondamentalisme, le nationalisme et tout discours haineux » et « [la] peur provoquée par l’arrivée massive d’immigrants[14] ». En 2019, le CROCEU a co-organisé un séminaire intitulé « le jour d’après en Syrie : une voie vers la résilience du peuple syrien », de concert avec la conférence des Églises européennes, la Commission des épiscopats de l’Union européenne et le Parti populaire européen. Le communiqué de presse rapporta les remarques soulevées par l’un des participants, mettant en avant que la communauté internationale devrait se concentrer sur « la reconstruction de la Syrie et le retour des réfugiés syriens dans leur pays », reconnaissant cependant que ce retour était illusoire. Alors que la conclusion mettait en avant les questions telles que « l’éducation, la santé mentale, le soutien psycho-social et spirituel, l’aide humanitaire[15] », les débats menés à Bruxelles ne semblent avoir eu que peu d’impacts à l’échelle locale. Globalement, les réunions entre officiels européens et orthodoxes sont un moyen de transmettre des messages et de partager l’expérience de rapports religion/État à l’échelle nationale, plutôt que d’apporter une réponse coordonnée des Églises orthodoxes à la crise des réfugiés. Il y a un décalage entre ce que les Églises sont supposées réaliser selon l’encyclique de 2016 et ce qu’elles sont en réalité prêtes à entreprendre. Les rencontres de haut niveau existent, cependant, les idéaux et leur mise en place sont freinés à d’autres échelons décisionnels.

Migrations et géopolitique au sein de l’Europe élargie

En tant qu’incarnations d’une religion et structures institutionnelles, les Églises orthodoxes ont à la fois soutenu des populations dans le besoin et condamné l’arrivée de réfugiés au sein de leurs communautés. Ce sont les États qui, in fine, ont arbitré la façon dont les réfugiés ont été soit acceptés, soit renvoyés par bus aux abords de la frontière. Les réfugiés ont été installés dans des centres d’accueil dans le sud-est de l’Europe ou à la frontière bélarusso-polonaise, mais, et c’est là le point essentiel, en s’appuyant sur des justifications géopolitiques qui comportent des préjugés religieux. La politisation de la religion, en lien avec la crise des réfugiés, a été l’une des caractéristiques du populisme et de la mobilisation de l’extrême-droite partout en Europe.

La réponse orthodoxe à l’arrivée des réfugiés n’est pas seulement liée aux pays d’accueil, mais concerne plus largement la forme revêtue par les relations inter-religieuses dans le monde chrétien-oriental. Un facteur clé dans cette perspective est la décision prise en 2018 par le patriarcat de Moscou et le patriarcat œcuménique de mettre un terme aux relations officielles les liant, en raison de l’autocéphalie (l’indépendance) de l’Église orthodoxe ukrainienne. L’autocéphalie, qui est reconnue par le patriarche œcuménique et un petit nombre d’Églises orthodoxes, demeure un sujet litigieux[16]. Les récits sur « l’autre » appliqués aux personnes déplacées ne comportent pas seulement une tonalité politique, mais revêtent également un caractère religieux. Dans le cadre du conflit russo-ukrainien, les Églises se positionnent dans un entre deux, situé entre les approches défendues par Kviv et Moscou sur les migrations. Entre ces deux perspectives, d’autres Églises orthodoxes sont confrontées à un même dilemme : leur soutien aux réfugiés et populations déplacées va-t-il être interprété comme un geste favorable à l’Église orthodoxe russe ou au patriarche œcuménique ? Les réponses apportées par les religions à la crise des réfugiés sont ainsi partie intégrante des discours sur le soft power. C’est particulièrement flagrant au regard des frontières ecclésiales quelque peu floues au sein de la diaspora des Églises orthodoxes et de l’émergence d’autres mouvements en faveur de nouvelles autocéphalies, telles les Églises orthodoxes macédonienne et monténégrine.

Les Églises orthodoxes sont profondément imbriquées dans le tissu social des sociétés du sud-est de l’Europe. L'une des principales conclusions des entretiens que nous avons réalisés avec des réfugiés dans six pays d’Europe du  Sud-Est était le nombre limité d’activités coordonnées menées par les communautés religieuses avec des réfugiés, et lorsqu’elles l’ont fait, comme en Serbie, les programmes interreligieux n’ont eu lieu que ponctuellement. Les communautés catholiques, orthodoxes et protestantes ont leurs propres programmes humanitaires. Ceux-ci s’organisent largement à l’échelle nationale avec peu voire aucune communication avec d’autres confessions ou au-delà des frontières étatiques. Une approche top-down devrait impliquer une communication inter-religieuse, suivie de gestes concrets aux niveaux régionaux, nationaux et internationaux afin de mettre un terme à la politisation de la religion et de se concentrer davantage sur l’intégration des réfugiés.

[1] The United Nations High Commissioner for Refugees, ‘Worldwide displacement hits all-time high as war and persecution increase’, 18 June 2015, https://www.unhcr.org/news/latest/2015/6/558193896/worldwide-displacement-hits-all-time-high-war-persecution-increase.html .

[2] The United Nations High Commissioner for Refugees, « Forced displacement passes 80 million by mid-2020 as COVID-19 tests refugee protection globally », 9 December 2020, [en ligne] https://www.unhcr.org/uk/news/press/2020/12/5fcf94a04/forced-displacement-passes-80-million-mid-2020-covid-19-tests-refugee-protection.html .

[3] Elena Fiddian-Qasmiyeh, Gil Loescher, Katy Long, Nando Sigona, « Introduction and Forced Migration Studies in Transition », dans Elena Fiddian-Qasmiyeh, Gil Loescher, Katy Long, Nando Sigona, The Oxford Handbook of Refugee and Forced Migration Studies, Oxford, Oxford University Press, 2014, p. 4. Voir également Ulrich Schmiedel and Graeme Smith (eds.), Religion in the European Refugee Crisis, Basingstoke, Palgrave, 2018 ; et Laura Zanfrini (ed.), Migrants and Religion: Paths, Issues, and Lenses. A Multi-disciplinary and Multi-sited Study on the Role of Religious Belongings in Migratory and Integration Processes, Leiden, Brill, 2020.

[4] Pour une analyse comparative entre différents pays, voir Victoria Hudson et Lucian N. Leustean (ed.), Religion and Forced Displacement in Eastern Europe, the Caucasus and Central Asia, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2022; et Lucian N. Leustean (ed.), Religion and Forced Displacement in the Eastern Orthodox World, London, Foreign Policy Centre, 2020. [En ligne] https://fpc.org.uk/publications/religion-and-forced-displacement-in-the-eastern-orthodox-world/

[5] BBC News, ‘Belarus border crisis: How are migrants getting there?’, 26 November 2021, https://www.bbc.co.uk/news/59233244 ; Laure Stephan, Jakub Iwaniuk and Madjid Zerrouky, ‘La Biélorussie orchestre l’arrivée de migrants par charters pour faire pression sur l’Europe’, Le Monde, 10 novembre 2021, https://www.lemonde.fr/international/article/2021/11/10/comment-la-bielorussie-fait-venir-des-charters-de-migrants-pour-mettre-la-pression-sur-l-union-europeenne_6101625_3210.html

[6] « EU forces Serbia to return visa regime for Iranian passport holders », 11/1/2018, [en ligne] https://www.schengenvisainfo.com/news/eu-forces-serbia-to-return-visa-regime-for-iranian-passport-holders/

[7] Daniela Kalkandjieva, « The Bulgarian Orthodox Church and the Refugee Crisis », dans Lucian N. Leustean (ed.), Forced Migration and Human Security in the Eastern Orthodox World, London, Routledge, 2019, pp. 229-250.

[8] « Pope Francis asks Bulgarians to ‘open hearts’ to migrants », 6/10/2019, [en ligne], https://www.euractiv.com/section/languages-culture/news/pope-francis-asks-bulgarians-to-open-hearts-to-migrants/ .

[9] « Synyparxis - Ecumenical Refugee Programme », [en ligne] https://www.kspm-erp.com/wp-content/uploads/2021/07/SYNYPARXIS_Brochure_%ce%a4%ce%b5%ce%bb%ce%b9%ce%ba%cf%8c.pdf .

[10] Amelia Gentleman, « “People felt threatened even by a puppet refugee“: Little Amal’s epic walk through love and fear », The Guardian, 18/10/2021, [en ligne] https://www.theguardian.com/stage/2021/oct/18/threatened-puppet-refugee-little-amals-epic-walk.

[11] Encyclical of the Holy and Great Council of the Orthodox Church, 2016, [en ligne] https://www.holycouncil.org/-/encyclical-holy-council .

[12] Le document, intitulé For the Life of the World: Towards a Social Ethos of the Orthodox Church, mars 2020, donne les exemple suivants : “séparer les enfants de leurs parents, éclater des familles, tourmenter des parents et leurs enfants, les maintenir dans des camps indéfiniment, ignorer la procédure officielle pour les demandeurs d’asile, calomnier et mentir à leur sujet, déployer les militaires à la frontière méridionale afin d’effrayer et de menacer des migrants désarmés, utiliser une rhétorique raciste et anti-immigrés au nom d’un intérêt politique, et ainsi de suite. Toutes ces actions constituent des atteintes à l’image de Dieu chez ceux qui demandent notre miséricorde. Ce sont des offenses envers le Saint Esprit. Au nom du Christ, l’Église orthodoxe dénonce ces pratiques et implore ceux qui en sont coupables de se repentir et de chercher à devenir des serviteurs de justice et de charité ». [En ligne] https://www.goarch.org/social-ethos .

[13] Gheorghe Anghel, « CROCEU meeting with the Austrian Presidency of the Council of the E.U. », 20/07/2018, [en ligne] https://basilica.ro/en/croceu-meeting-with-the-austrian-presidency-of-the-council-of-the-e-u/ .

[14] « Annual High Level Meeting of Religious Leaders in the European Commission », 10/10/2018, [en ligne] http://www.regue.eu/en/news/240-2018/660-annual-high-level-meeting-of-religious-leaders-in-the-european-commission .

[15] « A path towards the resilience of Syrian people », communiqué de presse n°19/07, 5 April 2019, https://www.ceceurope.org/a-path-towards-the-resilience-of-syrian-people/ .

[16] Alain Dieckhoff and Philippe Portier (eds.), « Autocéphalie et nationalisme », Observatoire international du religieux (bulletin no. 27), Paris, Centre de recherches internationales, Mars 2019, [en ligne] https://www.sciencespo.fr/ceri/oir/bulletin02e7.html?27 .

Pour citer ce document :
Lucian N. Leustean, "L’Union européenne, les Églises orthodoxes et la crise des réfugiés – Version française". Bulletin de l'Observatoire international du religieux N°35 [en ligne], janvier 2022. https://obsreligion.cnrs.fr/bulletin/lunion-europeenne-les-eglises-orthodoxes-et-la-crise-des-refugies/
Bulletin
Numéro : 35
janvier 2022

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Auteur.e.s

Lucian N. Leustean, maître de conférence, Aston University, Birmingham, Royaume-Uni.
Texte traduit par Anne Lancien

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