Bulletin N°01

En septembre dernier, le CERI a organisé, avec le concours de l’Institut National des Sciences Humaines et Sociales (INSHS), une école thématique sur les processus de radicalisation. Ce projet fut confié à plusieurs chercheurs du CNRS :

- Jacques Semelin, spécialiste des violences de masse (laboratoire CERI à Paris)
- Sylvie Ollitrault, spécialiste des mobilisations et de l’expertise, (laboratoire CRAPE à Rennes)
- Ariane Jossin, spécialiste des violences urbaines (laboratoire IRICE de la Sorbonne)
- Pamela Torres (responsable de l’organisation au CERI).

L’initiative a bénéficié du soutien du Comité Interministériel pour la Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation (CIPD-R) et de la Délégation Interministérielle de Lutte contre le Racisme et l’Antisémitisme (DILCRA).Elle s’inscrit donc dans un ensemble d’initiatives qui tâchent de répondre à une demande sociale de formation sur les questions de radicalisations contemporaines, exprimées après les attentats de janvier et novembre 2015 à Paris.

Or, les crises sociales, économiques et politiques donnent lieu à une diversité de trajectoires de radicalisation. Que ce soit en Europe, au Moyen-Orient ou ailleurs, elles revêtent des formes variées mais heureusement comparables d’un point de vue scientifique. L’analyse du risque terroriste doit conjuguer les approches : histoire, philosophie, sociologie, psychologie etc. On peut dès lors interroger les spécificités de l’islamisme armé, qui incarne aujourd’hui la figure de l’ennemi.

Car la radicalisation ne se limite pas aux violences perpétrées par des religieux fanatiques : les anarchistes russes de la fin du 19e siècle, l’OAS ou les nationalistes corses ont parfois recours aux modes d’action qualifiés de radicaux.

Dans cette perspective, les débats ont pu s’étendre sur quatre journées :

- Radicalisations : définitions et approches méthodologiques
- Trajectoires et quête de sens
- Radicalisation, mondialisation, communication
- Insertion et "dé-radicalisation" : approches comparées.

Les participants et la salle ont ainsi pu aborder des sujets variés. D’abord, les clarifications conceptuelles nécessaires (salafisme, fondamentalisme) notamment sur la notion de « radicalisme », dont le sens est l’objet de débats, au point que certains intervenants en rejettent l’emploi, pour lui préférer des approches dynamiques sur le passage à la violence, qui insistent sur leur dimension relationnelle. Ensuite, ce sont les trajectoires individuelles des djihadistes, les usages du corps (grève de la faim, kamikazes), et l’impact des réseaux (propagande, recrutement) qui ont mobilisé l’attention. Enfin, on a examiné les structures de veille mise en place dans divers pays, les dispositifs d’action publique en matière de prévention et dé-radicalisation etc. De ce point de vue, la lutte contre le terrorisme n’est pas cantonnée à des aspects sécuritaires.

Aboutissement majeur de cette école thématique, la réunion d’une cinquantaine de participants venus de milieux professionnels différents : chercheurs, praticiens du monde associatif, responsables publics, cliniciens du système carcéral, dont certains venus de l’étranger. Ceux qui sont confrontés aux problématiques du quotidien ont ainsi pu dialoguer avec ceux qui étudient la radicalisation. En outre, la présence d’interventions de spécialistes ou de praticiens venus de divers pays européens (Norvège, Belgique Allemagne, Autriche) et américains (Canada, Etats-Unis) a permis des comparaisons internationales. Le format retenu, réservé à un petit nombre d’inscrits, a également favorisé l’expression d’une parole libre. Mais entre les grilles de lectures théoriques, l’observation de terrain, le diagnostic du problème et les solutions concrètes à apporter, l’équilibre n’est jamais évident. Il y a là des enjeux éminemment complexes.

Un site internet regroupe de nombreuses ressources pour approfondir la réflexion, découvrir tous les acteurs institutionnels impliqués dans cette initiative et en saisir les derniers développements. On y trouve en particulier une section bibliographique et un calendrier des prochains évènements.

Pour aller plus loin :

- UCLAT 
- RELGIO-WEST
- Guide interministériel de prévention de la radicalisation